La Nature au service de la Médecine
a) Du saule à l'acide salicylique
b) La découverte de l'acide acétylsalicylique puis sa commercialisation
c) L'aspirine aujourd'hui
2) Le mode d'action de l'aspirine
a) Les cibles de l'aspirine
b) L'action de l'aspirine
II/. Les Holothuries et les implants biomédicaux
IV/. Autres exemples de biomimétisme au service de la médecine
a) Du saule à l'acide salicylique
Les vertus du saule blanc sont bien connues depuis l'Antiquité. En effet, Hippocrate (médecin et apothicaire du V° siècle avant J-C) conseillait déjà des décoctions de saule pour guérir les maux de tête.
Ces effets thérapeutiques sont présentés devant la Royal Medicine Society par Edward Stone en 1763.
En 1829, Pierre-Joseph LeRoux fait bouillir de la poudre d'écorce de saule, puis concentre sa préparation et obtient des cristaux solubles qu'il baptise salicyline. Plus tard, des scientifiques allemands purifient cette solution qu'ils appellent acide salicylique.
b) La découverte de l'acide acétylsalicylique puis sa commercialisation
En 1897, l'allemand Felix Hoffman réussit la synthèse de l'acide acétylsalicylique pur. Un brevet est déposé en 1899 et cet acide acétylsalicylique est commercialisé par la société Bayer sous le nom d'aspirine.
Cette nouvelle molécule a pour formule brute C9H8O4 :
Elle a pour masse molaire 180 g.mol-1 et apparait sous forme de cristaux incolores ou de poudre blanche.
Acide acétylsalicylique synthétisé en classe, voir nos expériences personnelles
c) L'aspirine aujourd'hui
Aujourd'hui, l'aspirine est le médicament le plus vendu dans le monde avec 40 000 tonnes d'aspirine produites chaque année (soit 120 milliards de comprimés de 300 mg). Elle est commercialisée sous différentes formes (comprimés, effervescents, poudre, gélules, suppositoires, etc.) et à différentes concentrations (de 100 mg pour les nourrissons à 1000 mg pour les adultes). En France, 237 médicaments contiennent de l'aspirine.
L'aspirine du marché est aujourd'hui accompagnée d'excipients dont les principaux sont :
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L'amidon de maïs pour faciliter sa mise en solution dans l'eau ;
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La silice pour faciliter la mise en forme du comprimé ;
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L'hydrogénocarbonate de sodium, utilisé pour les comprimés effervescents en raison du CO2 dégagé lorsqu'il entre en solution.
2) Le mode d'action de l'aspirine
L’aspirine est utilisée pour traiter différents maux comme la douleur, la fièvre, etc. Afin de comprendre le mode d’action de l’aspirine, il faut d’abord s’intéresser à ces cibles.
a) Les cibles de l'aspirine
Les eicosanoïdes (du grec eicosa= 20 pour le nombre d'atomes de carbone dans la molécule) sont des médiateurs intercellulaires produits par des cellules autocrines (les cellules produisent pour elles-mêmes) ou paracrines (pour des cellules voisines). En effet, ces molécules ont une durée de vie très courte (de quelques secondes à quelques minutes), elles n'ont donc pas le temps de circuler dans le sang et agissent directement sur le lieu de leur production.
La famille des eicosanoïdes regroupe les prostaglandines, les tromboxanes et les prostacyclines. Les prostaglandines ont été découvertes pour la première fois dans le liquide séminal par le scientifique Ulf von Euler (prix Nobel de physiologie et de médecine en 1970). Il baptisa cette substance ainsi car il pensait qu'elle était produite par la prostate. Cependant, il sera montré plus tard que les prostaglandines peuvent être produites par de nombreux autres organes.
Les eicosanoïdes sont synthétisés à partir des phospholipides membranaires :
Une des étapes clés de la synthèse des prostaglandines est assurée par la Cyclo-OXygénase(COX). Il existe deux types de COX: la COX1, une enzyme ubiquitaire produite par la plupart des tissus du corps humain, tandis que la COX2 n'est que faiblement produite, et a besoin d'un signal déclencheur pour être fabriquée en grande quantité ; ce signal correspond pour cette enzyme à une situation inflammatoire.
La principale action de l'aspirine consiste à inhiber ces COX afin d'inhiber la synthèse des prostaglandines.
b) L'action de l'aspirine
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La Douleur
Les prostaglandines abaissent le seuil de stimulation des récepteurs à la douleur en se fixant sur des sites spécifiques existants sur des fibres nerveuses amyéliniques. Elles facilitent donc l'activité électrique des récepteurs. Ainsi, une stimulation faible, non douloureuse au départ, le devient sous l’action hyperalgésique des prostaglandines.
En inhibant les enzymes COX et donc la synthèse des prostaglandines au niveau des terminaisons nerveuses, l'aspirine limite l'abaissement du seuil de stimulation des récepteurs et, par conséquent, diminue le passage des messages nerveux. L'aspirine a donc une action antalgique (ou analgésique).
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La fièvre
La température corporelle est régulée par l'hypothalamus. Elle est régulée à 37°C en temps normal sauf en cas d'inflammation ou d'infection où la température est supérieure : c'est la fièvre. Sur le lieu de l'infection ou de l'inflammation, des macrophages sécrètent des molécules protéiques : les interleukines 1 (IL1). Ces IL1atteignent l'hypothalamus par voie sanguine et y déclenchent la production de prostaglandines E. Ces dernières agissent sur l'hypothalamus qui commande les mécanismes de production (contraction involontaire des muscles) et de rétention de la chaleur (constriction des vaisseaux sanguins voisins) dont le résultat est une augmentation de la température du corps.
En inhibant la COX et donc la synthèse des prostaglandines E, l'aspirine met en marche le mécanisme de perdition de chaleur (par sudation et dilatation des vaisseaux). La température chute et redevient normale : c'est l'action antipyrétique. Cependant il est à noter que la prise d'aspirine en absence de fièvre n'entraîne pas une baisse de la température.
II/. Les holothuries et les implants biomédicaux
L'holothurie, plus communément appelée "concombre de mer", est un animal en forme de cylindre pouvant atteindre 25 centimètres de long. L'une de ses extrémités porte sa bouche, entourée d'une couronne de petits tentacules. A quatre mille mètres de profondeur, les holothuries constituent la moitié des êtres vivants.
L'holothurie présente des propriétés intéressantes pour la médecine. En effet, l'holothurie, au corps normalement élastique, peut aussi se durcir quasi instantanément en cas d'attaque. Sa peau, dans laquelle se trouvant des fibrilles de calcite, devient ainsi très résistante.
Ce type de matériau pourrait un jour servir par exemple pour des implants biomédicaux, sous la forme de gaine de protection autour des microélectrodes cérébrales qui seraient alors rigide au moment de leur implantation puis flexibles ensuite pour êtres mieux tolérées dans les tissus environnant au milieu cérébral.
Les scientifiques travaillant sur ce projet ont finalement réussi à créer un matériau présentant ces propriétés singulières. Une fois plongé dans un solvant spécifique, l'objet en question se rigidifie, car les fibres le constituant se resserrent entre elles. Au bout d'environ 5 minutes et pendant quelques 8 à 10 minutes, ces fibres se relâchent progressivement avant de reprendre leur position initiale, et de rendre à l'objet sa "mollesse" initiale. Toutefois ce genre de matériau n'est pas encore utilisé, car celui-ci n'est pas totalement au point, et les chercheurs ont encore du mal à maintenir la rigidité des électrodes. De plus, la majeure question qui plane encore est, une fois l'électrode implantée, comment la rigidifier afin de l'extraire ? Malgré tout, ceux-ci restent confiants quant à la commercialisation et à la mise en service de telles produits, dans un futur plus ou moins proche.
Curiosité scientifique : L’usage médical de l’holothurie ne date pas d’aujourd’hui. Dans la médecine naturelle chinoise, le concombre de mer est utilisé depuis près de 5000 ans dans le traitement des douleurs articulaires. Des recherches australiennes et américaines montrent que la prise de concombre de mer aurait une action bénéfique sur la force de préhension, les raideurs articulaires, voire la formule sanguine. Ceci s’expliquerait par l’action anti-inflammatoire du concombre de mer.
Cette plante est un pavot somnifère, que l'on trouve notamment en Europe et au Maghreb, connue pour ses propriétés sédatives et apaisantes.
Cette plante contient un nombre important d'alcaloïdes, soit des molécules organiques pouvant avoir une utilité en pharmacie.
Le principal alcaloïde, et aussi le plus connu est la Morphine, il fut découvert au début du 19ème siècle par des scientifiques allemands et ses propriétés furent découvertes par le pharmacien allemand Sertürner.
Elle est très rapidement exploitée par de nombreux scientifiques au cours du temps, reconnue pour ses propriétés d'anesthésiant.
Durant le 20ème siècle, elle fut notamment utilisée durant les guerres pour aider les belligérants à ne pas ressentir la douleur durant malgré la brutalité des affrontements.
Elle ne fut réellement utilisée qu'au cours du 20ème siècle, avec des injections intraveineuses. Mais pas seulement, des scientifiques s'en sont inspirés pour créer d'autres produits, par exemple en 1950, le cocktail de Brompton, aidant à apaiser les souffrances en fin de vie.
Sa synthèse chimique ne fut instaurée qu'en 1952, par Gates et Tschudi, moins chère à produire, la morphine chimique est également plus efficace.
Actuellement, elle est utilisée en Hôpitaux ou par le SAMU en cas de douleurs intenses d'un patient. On la voit également souvent dans les films d'action américains (ex: Die Hard IV, avec Bruce Willis)
IV/. Autres exemples de biomimétisme au service de la médecine
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Le Taxotère est un médicament anticancéreux synthétisé en France en 1989 à partir des aiguilles de l'if européen.
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De nombreux médicaments sont issus de composés naturels (par exemple : la morphine, l'hydrocortisone, le paracétamol, etc.).
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La bave d'escargot a des propriétés physiques qui la rendent à la fois élastique et très résistante, ce qui a inspiré les scientifiques pour créer d'éventuelles prothèses pour les ligaments et les tendons.
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Un ver marin produit de la glu dont les chirurgiens pourraient se servir pour réparer les fractures osseuses. Cette glu permettrait de remplacer les broches en métal utilisées actuellement.
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L'américain Ron Miles a développé une toute nouvelle gamme de prothèses auditives en s'inspirant de la structure particulière des oreilles de la mouche Ormia Ochracea.